2010.11.08 Couleurs d'automne
Alors que les premières blancheurs ont déjà tapissé la Haute-Savoie par petits saupoudrages épars descendant crescendo, encore un peu plus bas le jour où sont écrites ces lignes, l'automne, lui, fait feu de tout bois sur la végétation sans demander son reste.
Fi de ces premiers flocons masquant les feuillages ou autres épines jusqu'aux redoux qui succèdent aux floconnées hasardeuses, semblant marquer par anticipation leur territoire pour l'hiver, tel l'éclaireur pour une armée blanche prête à prendre possession de la montagne.
Les plus hauts sommets ont déjà semble-t-il fait le voeu de conserver dès à présent ce parement hivernal; mais au-dessous, les couleurs de l'automne s'imposent au regard de qui veut bien s'en émerveiller. Un flamboiement végétal qui donne soudain un relief accentué au tapis vert qui couvre uniformément le paysage. Partant d'un tissage chlorophyllien presque unis, monochrome, la magie de dame nature nous propose la page "novembre" en quadrichromie, si l'on excepte les nuances et dégradés que seul un arrêt attentif sur image permettra de déceler.
C'est juste magnifique ! Telles les couleurs extravagantes d'un papillon qui ne les portera que quelques heures, la montagne se tapisse de rouges ocrés sombres, de jaunes qui feraient pâlir une moutarde la plus forte, des oranges pyromanes et des verts qui blêmissent de voir arriver le manteau blanc.
Des feuilles qui "chantent" l'automne et proposent un programme visuel différent chaque jour. Comme une pièce jouée une fois l'an depuis que le monde est monde, presque dans un ordre immuable d'apparition, chaque couleur vedette habille les branches d'arbres, parfois en groupes, parfois comme sous les tapotements aléatoires d'un peintre paysager inspiré.
Les épicéas, parents pauvre des résineux, se parent directement de jaunes torrides qui habillent certains pans entiers de montagne leur donnant ainsi une apparence presque artificielle.
Aux couleurs flashies des fleurs de bourgeons printaniers, l'automne oppose ainsi des teintes empruntes d'une mélancolie ondulante qui se répand peu à peu au sol, faisant aussi participer la terre qui sera la dernière à accueillir ces confettis temporaires, avant que la neige ne les recouvrent.
Seuls les sapins et autres résistants se jouent de ces mues automnales, mais ils n'en seront pas moins blanchis de cristaux comme tous les autres.
Une magie visuelle qui s'offrent au voyageurs du Mont-Blanc Express, surprenant même jusqu'aux utilisateurs quotidiens les plus blasés.
Un kaléidoscope muant chaque jour et s'offrant comme un interlude reposant aux yeux des conducteurs du "Petit train de Chamonix" qui vont devoir très vite s'accommoder de la blancheur hivernale vive et monochrome , presque aveuglante.
Si le temps suspend son vol, alors les feuillages multicolores égrènent les derniers jours de l'automne qui attend inexorablement son linceul de glace.